Commerce. Les marques de vêtements se mettent à l’occasion

2021/2/23

Acheter un vêtement et le revendre quelque temps après sur le site de la marque ? De plus en plus d’enseignes se lancent sur ce créneau, en France. En décembre, La Redoute a annoncé la création de  « La Reboucle » , son site de revente entre particuliers. Les premières transactions, qui concernent l’habillement mais pas que, ont démarré en janvier. L’idée n’est pas nouvelle. Petit Bateau, Cyrillus, via son site Seconde histoire, ou Okaïdi, avec son service ÏDtroc, ont opté pour cette démarche dite responsable il y a plusieurs années déjà et chacune à sa façon. Via un site ou une application dédiés, en ligne ou en boutique, avec carte-cadeau ou bon d’achat en contrepartie…


Prouver la qualité et fidéliser

Mais face au succès des plateformes dites collaboratives, et notamment de Vinted, qui compte plus de 12,5 millions d’utilisateurs en France, la tendance s’est accélérée.


En 2019, 32 % des Français ont effectué un achat de seconde main en mode, contre 16 % en 2018, selon l’institut Kantar. Pour les marques, les avantages sont multiples : récupérer une valeur qu’elles ont contribué à créer d’abord, prouver la durabilité du vêtement et ainsi fidéliser le consommateur.


 C’est une façon de dire à nos clients que nos produits sont de qualité, puisqu’on va les revendre d’occasion dans nos magasins, confirme Ludovic Leurent, responsable seconde vie des produits des marques Ïdkids. C’est aussi une façon de les fidéliser, oui, parce que ceux qui ont acheté nos produits sont contents de récupérer une carte-cadeau pour pouvoir rééquiper l’enfant qui a grandi. Et ça permet aussi de créer du lien en magasin. 


« Acheter en seconde main n’est plus dévalorisant »

Majdouline Sbai, sociologue et autrice d’Une mode éthique est-elle possible ? (13 €, Rue de l’échiquier) revient sur la mode des achats de vêtements en seconde main.


Pourquoi un tel engouement pour les vêtements d’occasion ?


En 2020, les magasins ont fermé plusieurs mois. Le numérique a compensé un peu, mais le marché de l’habillement neuf est en récession depuis des années, tandis que celui de la seconde main explose. Aujourd’hui, la vie sociale est réduite à portion congrue, on n’est pas dans une logique de représentation, mais plutôt dans celle d’adapter ses achats à ses besoins. Puis, acheter en seconde main n’est plus dévalorisant, au contraire.


Peut-on dire que les plateformes ont « tué » le marché de l’habillement ?


Non, en fait, une nouvelle valeur est créée autrement par ces plateformes. L’objectif pour les marques est de la capter. C’est d’autant plus important que, si l’économie dite collaborative devenait la norme, on aurait un souci sur deux points : les emplois et la solidarité nationale. Quand les gens vendent sur leur temps libre, il n’y a pas de cotisations sociales. Sans compter la remise en cause complète de la dynamique de la vie locale.


Ces initiatives annoncent-elles la fin de la « fast fashion » ?


C’est un changement de business model et de métier pour les marques, donc, d’une certaine manière, oui. Ça conduit, en tout cas, à penser le produit dans ses différentes vies. Une des valeurs ajoutées du seconde main par les enseignes sera soit d’être l’intermédiaire, soit de reconditionner les produits. Cela peut se faire en magasins, qui ont aussi besoin d’avoir une nouvelle attractivité. Mais il faut penser qu’un changement souhaitable pour une entreprise doit aussi être un changement rentable.

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